Il avait ainsi procédé à une déclaration estimative prenant en compte les perspectives réelles de recouvrement.
Percevant
une sous-estimation de la valeur de ces comptes courants d'associé,
l'administration fiscale lui avait adressé deux propositions de
rectification. Dans ces circonstances, le contribuable avait effectué
une réclamation contentieuse, qui fit l'objet d'une décision de rejet.
Ce dernier a alors porté l'affaire devant le juge judiciaire. A la suite
de son décès, l'instance a été reprise par ses ayants droit qui se sont
pourvus en cassation contre l'arrêt de rejet rendu par la Cour d'appel
de Douai le 21 mars 2011.
Il
est de principe qu'en vertu des dispositions de l'article 885 S du CGI,
la valeur des biens et droits qui constituent l'assiette de l'ISF est
déterminée selon les règles applicables en matière de droit de
succession.
Quant
aux comptes courants d'associé, l'article 885 E du même Code vient
préciser, dans son alinéa 1 er , que l'assiette de l'ISF est déterminée
par leur valeur nette comptable au 1 er janvier de l'année de
déclaration.
Dans
un arrêt rendu le 11 mars 2008 par la chambre commerciale (Cass. com.,
11 mars 2008, n°07-10.643), la Cour de cassation était venue asseoir ce
principe en soulignant toutefois que les comptes courants d'associé
pouvaient être évalués par le contribuable pour leur valeur probable de
recouvrement compte tenu de la situation financière de l'entreprise.
Pour procéder à cette méthode d'évaluation, deux conditions cumulatives
doivent être remplies : les comptes détenus dans l'entreprise ne doivent
pas être bloqués, et cette dernière doit se trouver en situation de
difficultés financières.
La seule situation nette comptable négative dans les
comptes de la société ne suffit pas pour évaluer le compte courant
d'associé à sa valeur probable de recouvrement
Dans
leur décision du 15 mai 2012, les juges ont également apporté des
précisions quant à la notion d'entreprise en difficulté. En effet, le
seul fait que les comptes sociaux de l'entreprise révèlent une situation
nette comptable négative ne suffit pas à caractériser des difficultés
économiques lourdes rencontrées par celle-ci. Dès lors que l'entreprise
ne se trouve pas en difficulté au sens de l'administration fiscale, le
contribuable ne remplit pas les conditions lui permettant de déclarer
une valeur probable de recouvrement des comptes courants au 1 er janvier
de l'année d'imposition inférieure à la valeur nominale figurant au
bilan.
En
l'espèce, la situation nette négative des sociétés dans lesquelles le
contribuable détenait ses comptes ne suffisait pas à caractériser leurs
difficultés financières et ce dernier n'était donc pas fondé à procéder à
une estimation de la valeur de recouvrement de ceux-ci, par hypothèse
inférieure à la valeur nominale figurant au bilan.
La charge de la preuve des difficultés financières rencontrées par l'entreprise pèse sur le contribuable
S'il
est de principe que la valeur des comptes courants d'associé soit
déterminée par la déclaration du contribuable, cette déclaration peut
néanmoins faire l'objet d'une contestation par l'administration fiscale.
En
l'espèce, l'évaluation effectuée par le redevable a fait l'objet d'une
contestation. Et l'argumentation formulée par les demandeurs selon
laquelle « le droit pour le contribuable de fonder l'évaluation du
compte courant sur sa valeur probable de recouvrement ne suppose
nullement la démonstration préalable de l'existence des difficultés
financières de la société » a été purement et simplement rejetée par la Cour.
Pour
autant, un précédent arrêt rendu par la chambre commerciale en matière
de compte courant d'associé et d'ISF mérite de retenir toute l'attention
du lecteur (Cass. Com., 19 janvier 2010, n°09-10.994).
Dans
cette affaire, l'administration fiscale avait reproché à un
contribuable d'avoir omis d'inclure dans sa déclaration, et ce pendant
plusieurs années, le solde créditeur d'un compte courant qu'il détenait
dans une société. Pour toute réponse, ce dernier a invoqué les
difficultés financières rencontrées par l'entreprise et a ensuite
prétendu que la valeur probable de recouvrement du solde était nulle.
Ses allégations ont été rejetées et les juges de cassation ont posé le
principe selon lequel, en l'absence de déclaration du compte,
l'administration est fondée à en fixer la valeur au regard de la seule
valeur nominale et c'est à l'associé qui entend contester l'évaluation
retenue d'en établir la valeur réelle.
Ainsi,
les associés ont tout intérêt à porter dans leur déclaration la valeur
de recouvrement du compte qu'ils estiment probable même si elle est
nulle. En effet, dans cette hypothèse la charge de la preuve est
inversée et c'est à l'administration de démontrer que le montant déclaré
est insuffisant compte tenu de la probabilité de remboursement du
compte.
Dans l'arrêt rendu le 15 mai 2012, la Cour revient sur sa position et pose le principe selon lequel «?il
appartient au contribuable de rapporter la preuve des difficultés
financières alléguées à la date du fait générateur de l'impôt, de nature
à justifier que les comptes courants soient évalués à la valeur
probable de recouvrement, inférieure à la valeur nominale figurant au
bilan ».
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